Cartographie de la toile cosmique
Dans l’Univers, les galaxies s’ordonnent le long d’un réseau de filaments gazeux – c’est en tout cas ce qu’indiquent les simulations cosmologiques. Mais observer expérimentalement ces gigantesques structures de gaz s’avère extrêmement difficile. Une équipe internationale dont fait partie l’ETH Zurich vient d’y parvenir.
Selon la cosmologie moderne, l’Univers est né du Big Bang, il y a près de 14 milliards d'années, et une grande partie de l’hydrogène créé dans cette boule de feu s’est effondrée pour produire un réseau de filaments diffus de gaz qui constituent une sorte de toile d’araignée cosmique. Ces filaments, observés en détail maintenant seulement, fourniraient la matière brute qui alimente les étoiles alors que les galaxies se formeraient à leurs intersections. Mais à cause de leur faible densité ils n’émettent que très peu de lumière. Jusqu’à présent, ils ne pouvaient donc être détectés qu’indirectement, en étudiant la lumière qu’ils absorbent d’objets très brillants situés derrière eux. De telles mesures sont toutefois limitées à la ligne de vision reliant l’observateur à l’objet.
Dans une nouvelle étude, une équipe internationale, dont Sebastiano Cantalupo de l’ETH Zurich, a dressé une carte de tels filaments, basée sur l’émission de lumière du gaz lui-même. Les filaments observés, situés dans un amas très dense de galaxies et de gaz, dans le proto-amas SSA22 – à une douzaine de milliards d’années-lumière de la Terre et longue de 3 millions d’années-lumière. Leur hydrogène gazeux émet de la lumière ultraviolette sous l’effet de fortes sources de rayonnement telles de nombreuses nouvelles étoiles ou l’environnement de trous noirs massifs.
La lumière a pu être capturée grâce à un instrument optique à champ de vision très large du Très Grand Télescope (VLT) au Chili. «Nous avons uniquement réussi à le faire grâce aux rares sources de rayonnement très fortes à l’intérieur des filaments», souligne Sebastiano Cantalupo. «Cartographier de plus larges parties de la toile cosmique et dans des régions plus typiques de l’Univers requiert des mesures plus longues et vastes.» Le chercheur de l’ETH Zurich vient d’entreprendre un tel projet.