ères de la Terre
Finalement, pas d’anthropocène
L’idée de proclamer l’ère terrestre de l’être humain, et donc de ses effets dévastateurs sur la planète, a reçu un refus. En voici les raisons.
Après vingt ans de discussions incessantes, l’Union internationale des sciences géologiques (IUGS) a décidé cette année de ne pas déclarer la nouvelle ère de l’anthropocène. Beaucoup de spécialistes de l’environnement furent déçus. Ils espéraient la reconnaissance officielle des changements fondamentaux que les humains ont infligés au globe. D’autres, en revanche, ont estimé qu’il était juste que la science «ne se laisse pas pousser à la provocation politique», note Ritwick Ghosh, sociologue de l’environnement, dans la revue spécialisée Issues in Science and Technology.
Le terme «anthropocène» (ère de l’être humain) a été popularisé en 2000 par le Prix Nobel Paul Crutzen. L’idée est que la Terre a quitté l’Holocène et est entrée dans une nouvelle ère caractérisée par l’influence humaine sur la planète. Le terme est rapidement devenu populaire auprès des défenseurs du climat.
Plusieurs raisons expliquent la décision de l’UISG. Entre autres, l’anthropocène aurait eu besoin d’une date de début claire, la première retombée radioactive après un test de bombe atomique étant favorisée, car facile à mesurer. Cette restriction a rencontré une forte résistance, car d’autres interventions, telles que les émissions de gaz à effet de serre, n’ont pas été retenues. Certains scientifiques ont donc estimé qu’il valait mieux que le concept reste informel, sans définition technique.
Un autre argument vient du sociologue John Bellamy Foster: le problème n’est pas l’humanité entière, mais le système capitaliste. Selon le rapport Oxfam 2020, la moitié la plus pauvre du monde n’est responsable que de 7% des gaz à effet de serre. Il serait donc faux d’attribuer à tous l’effet dévastateur sur la Terre. L’anthropocène reflète de plus pour Ritwick Ghosh «le concept biblique selon lequel toutes les périodes précédant les humains étaient un Eden avant la chute».