L’émotivité nuit à la crédibilité
Si l’on en croit la psychologie populaire, les femmes sont moins crédibles car plus sujettes aux émotions. La réalité n’est pas aussi simpliste.
Quand on laisse ses émotions dicter ses actes, on paraît moins crédible, quel que soit le genre auquel on appartient. C’est ce que révèle une étude du philosophe et psychologue Rodrigo Díaz de l’Université de Berne, menée avec son collègue Manuel Almagro de l’Université de Grenade. L’étude n’est par contre pas parvenue à confirmer que les femmes seraient perçues comme étant plus émotives et donc moins crédibles que les hommes.
Rodrigo Díaz s’intéresse aux raisons de la discrimination de certains groupes sociaux. «Le sexisme est un cas typique», dit-il. Une des conjectures sur la façon dont naît ce sexisme est issue de la psychologie populaire: l’idée répandue est que les femmes sont plus émotives que les hommes. Et une personne qui argumente de façon émotionnelle voit sa crédibilité en souffrir. Il en découle que les femmes sont considérées comme moins crédibles que les hommes.
Rodrigo Díaz a vérifié cet énoncé dans une expérience réalisée avec 250 sujets américains. Les participantes et participants ont reçu le procès-verbal d’un appel fictif au service des urgences de la police. Pour la moitié des sujets, c’est une femme sans nouvelles de son mari depuis plusieurs jours qui appelait les secours, craignant qu’il ne se soit suicidé. L’autre moitié a reçu la transcription de l’appel d’un homme en proie à des craintes similaires pour sa femme. Les personnes participant à l’étude devaient ensuite évaluer le niveau d’émotion de la personne qui appelait, ainsi que la crédibilité de ses explications. Résultat: la femme et l’homme étaient aussi peu crédibles l’un que l’autre. Et l’épouse fictive appelant à l’aide n’a pas été plus souvent jugée émotive que son pendant masculin.
Rodrigo Díaz et Manuel Almagro n’ont examiné qu’une variante du sexisme. «Les femmes sont victimes d’autres stéréotypes», affirme Rodrigo Díaz. Le chercheur va mener des études complémentaires pour savoir quand ces stéréotypes conduisent au sexisme.